Virus, ce nom ne vous dit peut-être pas grand-chose et pourtant il est le dernier serial killer de l’hexagone. En 3 dates clefs ce jeune à l’allure normale va basculer dans une boucherie sans commune mesure. Au départ, personne ne soupçonnera une vague de violence aussi étendue et surtout un modus operandi assez réfléchi pour que Virus accompagné dans sa folie par son acolyte Banane agissent de manière calculée et sans anicroche. Mais derrière ces 3 bains de sang, cette échappée criminelle est aussi la rencontre de deux individus qui rassemble l’ensemble des maux d’une société dépecée de son rôle sociale et incapable de repêcher ses enfants les plus à la dérive. Virus et Banane, un duo de sociopathes trop connectés à une réalité inhumaine et qui renvoient à ses propres démons une société aux abois.
Dimanche 15 août 18 heures et 27 minutes précisément à l’entrée d’un camping de nudiste proche de Gravatas-les-Flots, la chaleur n’est plus au rendez-vous, la pluie a pris le dessus, les quelques aventuriers affichent un teint hâlé malgré ce temps automnal. Nus dans leur tenue, ils ne remarquent pas ce jeune homme pâle qui marche à l’ombre des pins vêtus d’un jean et d’un sweat à capuche sombre avec son grand sac noir semblant bien lourd... Pourtant dans les 10 minutes qui vont suivre le bal des horreurs va commencer, en un peu plus d’un quart d’heure, Virusaidé de Banane imbibera le sable du camping du sang de ses occupants. Les deux compères ressortiront du camping sans difficulté laissant derrière 85 corps inanimés. Arrivé 20 minutes plus tard, l’inspecteur Gofrard de la SRPJ de Montpellier reste sous le choc :
- la gendarmerie de Gravatas nous avait avertis, mais souvent on amenuise les propos des gars mais pour le coup… Entrée dans le camping, mon équipe prend très vite conscience du massacre. Le plus important était d’organiser au mieux les secours pour venir en aide aux victimes encore vivantes sans salir la scène de crime. Très vite on tombe sur une clé USB. D’après un témoin, l’assassin l’a fait tomber consciemment.
Le camping devient un vrai terrain surveillé où les entrées et sorties sont filtrées avec la plus grande précaution. 5 heures plus tard l’équipe de l’inspecteur Gofrard rejoint les locaux décidés à inspecter de plus près cette fameuse clé USB. Dedans, 4 fichiers audio qui vont permettre d’identifier la personnalité du tueur mais aussi l’élément déclencheur de cette horreur…
La trajectoire de Virus commence à Rouen, enfant réservé mais très vite réfractaire au système scolaire, Virus fait de la résistance et ne se reconnaît pas dans ce cadre. Incapable d’extérioriser, se désocialisant en allant même jusqu’à sécher la piscine, le gosse tourne en rond et préfère l’eau froide de la manche aux plages ensoleillées de la Côte d’Azur (Saupoudré de Vengeance). Malgré tout, Virus reste la tête en dehors de l’eau évitant ainsi de se noyer dans sa paranoïa. Mais la réalité d’une société à la dérive lui brûle à petit feu ses dernières onces d’humanité. Témoin de l’exhibition constante d’une population sans principe, Virus s’interroge sur la pornographie globale, télévision connectée aux pulsions les plus barrées de l’être humain et le string vendu dans le cartable des collégiennes (tu reluttes ?). Pourtant, Virus résiste et son envie d’exploser est canalisée par son fort intérieur, dernier rempart avant la folie qui le drive dans une vie rangée avec petite copine et animaux de compagnie. Mais voilà, c’est dimanche, il pleut et discussion anodine se transforme en scène de ménage, le ton monte, les remparts s’effondrent, le monstre commence à sortir de son terrier. Laissé sur le pas de la porte, Virus marche sans but et le destin va le pousser à croiser un être énigmatique : Banane. Comme un double spirituel, la confrontation tourne à la paranoïa, l’univers sombre et froid proposé par l’inconnu va définitivement faire craquer les dives du raisonnable de Virus (#31#). La bête est libre, les mots doivent frapper, le besoin de s’exprimer ne peut se matérialiser que par la punition, au loin un camping de nudistes…
Si le profil psychologique du tueur est en partie identifié, Virus ne reste qu’un pseudonyme et les éléments permettant de l’identifier restent très maigres pour le SRPJ de Montpellier. De plus, c’est le silence radio, alors que plusieurs psychologues alertent d’une nouvelle attaque dans les jours à venir, Virus et Banane ne se manifestent plus…
- Toutes les unités étaient en alerte, se rappelle l’inspecteur, on s’attendait à ce que les deux gus s’engagent dans un Road trip meurtrier. . Mais au bout d’un mois de silence, on sent que la piste disparaît et l’on en vient même à se demander s’ils n’ont pas passé la frontière direction l’Italie.
Les autorités ont tous faux, les deux tueurs ne sont pas sortis du territoire mais ils sont cloîtrés dans un repère au fin fond de la Savoie, préparant avec délectation leur prochaine sortie pour le 31 décembre 2010…
Plus de 4 mois après le traumatisme de Gravatas-les-Flots, la France se remet sans pouvoir expliquer ce geste sans en comprendre toute sa portée. Société sous anxiolytique ou incapable de se responsabiliser, toujours est-il que les médias semblent avoir tourné un peu trop vite la page « Virus et Banane ». Mais le retour du boomerang risque de leur être fatal.
Blatillon-sur-Pluses, petite bourgade de Haute-Savoie, ici on n’est pas très fan des étrangers qu’il soit du coin où d’ailleurs et les votes frontistes ont eu de beaux jours devant eux. Pour autant, on sait faire la fête quand le moment s’y prête, l’arrivée de 2011 est une excuse pour occuper la salle polyvalente de la municipalité afin d’y organiser un bal musette autour d’un grand buffet. La fête populaire semble être placée sous les meilleurs auspices pour autant les présages n’invoquent rien de bon quand une vieille Peugeot 407 grise vient se garer sur le parking de la mairie, il est 20h30 et les habitants trop préoccupés à dévaliser le buffet ne se rendent pas compte que les deux invités ne sont pas venus les mains vides…
La localisation est un terrain parfait pour les deux prédateurs, en haut de montagne et à plus de ¾ d’heure du premier poste de police, les voilà seuls fassent à leurs proies dont la vision est limité par le flot continu des flocons de neige. Pas de fioriture aussi agressive que la première salve du 15 août, Virus et Banane agissent avec une rapidité déconcertante. En moins de 20 minutes, les deux prédateurs ayant chacun bloqué une des deux sorties de la salle va éliminer avec une moyenne d’une balle par personne l’ensemble des habitants. Des témoins ? Des rescapés ? Aucun, et la découverte de cette scène macabre se fera le lendemain matin quand une bande de jeunes amis partis réveillonner dans un autre bourg se questionnera du silence trop lourd pesant sur le village, 12 heures après l’exécution, le bain de sang n’est pas qu’une métaphore…
À la SRPJ d’Annecy, les suppositions vont bon train, village sous le coup d’une secte. Folie meurtrière d’un électron libre de l’extrême droite ? Toutes les hypothèses sont soulevées et la pisteVirus et Banane refait surface… l’inspecteur Gofrard de le SRPJ de Montpellier est dépêché dans la journée :
- Malgré une courte nuit, je me suis tout de suite mis en route, les collègues à la suite. Je m’attendais à une nouvelle hécatombe, pourtant je suis resté prudent car sur place, personne ne pouvait me confirmer la présence de clé USB ou de support audio donc dur d’avoir des certitudes sur les auteurs de cette exécution barbare.
Arrivé sur place, c’est une vraie cohue, le manque de personnel nepermet pas de faire face à l’afflux massif de journalistes et de curieux venus s’affairer devant la salle polyvalente. À l'intérieur, on essaie au mieux de préserver la scène de crime. L’inspecteur Gofrard et son équipe se mettent à chercher l’élément identificateur. Vingt minutes plus tard, collé à un pli de pantalon grâce au sang séché, une clé usb… Pas de temps à perdre, on diffuse les quatre nouveaux fichiers :
Déconnecté de la réalité, Virus atteint le point de non-retour son œuvre est son testament, ça passe ou ça casse… L’homme souvent acteur devient spectateur un pied dans la lucidité, l’autre dans une schizophrénie sadique et meurtrière. Les conséquences ? Virus n’en a que faire car à l’intérieur il se sent déjà mort (faites entrer l’accusé). Homme de l’ombre et du froid, le temps de décembre derrière ces fêtes chaleureuses remplies les conditions à sa créativité et s’accorde avec une bande-son de Banane qui est à la musique ce que « C’est arrivé près de chez vous » est cinéma (sale défaite). Mais que l’on ne se trompe pas car derrière une fragilité psychologique se cache en fait un personnage sans rémission et met en garde ses poursuivants : son silence n’est pas synonyme d’apaisement bien au contraire… Et si certains doutaient de son jusqu’auboutisme les dates du 15 août 2010 et du 31 décembre 2010 leur rappelleront que Virus ne rigole plus (Zavatta rigole plus). Pas à sa place, la seule porte de sortie pour s’intégrer est d’exister dans le carnage musical, à travers ces tueries, Virus se soigne sans attendre de la population une compréhension de ses gestes, la fracture est irréversible (l’incruste). Francis Le peigne procureur dépêché sur les lieux témoigne :
- Pendant toute votre formation, on vous a averti du pire, qu’un jour vous pouvez vous retrouver face à l’inéducable mais on est jamais prêt et la vue du carnage ne peut que vous impacter au plus profond de vous…
De leur côté Virus et Banane semblent déjà loin et même la mise en place de barrages est peine perdue…
- Ils ont un temps d'avance et une capacité à être calculateurs qui montre la minutie de leurs actes. Pour ma part, seule l’exploitation de la clé USB pourra fournir des détails quant à la suite. Mais espérer un arrêt de leur barbarie relève de l’utopie… Il faut s’attendre au pire, s’exaspère l’inspecteur Gofrard.
La violence lâchée dans cet acte II fait suspecter un 3ème acte mais comment pouvoir en être sûr ? Sur le terrain, l’exploitation des divers événements ne porte pas les fruits espérés.
- Les services sont sur les dents et l’ensemble des acteurs travaillent à ratisser le territoire. Mais très vite, on se rend compte qu’avec toute la volonté du monde, aucune piste ne mène à un indice probant. Nous sommes dans l’attente d’un faux pas, résume froidement le procureur.
Malheureusement, ce faux pas n’arrivera pas… Bien au contraire, le 3ème acte va venir clôturer un Road trip sanglant l'œuvre lancée le 15 août 2010… Alors que les brigades s’attendent à un passage à l’acte sur un jour férié, Virus et Banane vont prendre à contre-pied les enquêteurs en attaquant un 14 février, jour de la Saint-Valentin.
- On n'a pas été psychologue, analyse l’inspecteur Gofrard, on s’attendait à un modus operandi sur une fête nationale comme un premier mai alors que la réponse était devant nos yeux et que les psychologues n’ont pas su nous alerter. Pourtant la Saint-Valentin est tout un symbole quand intérieurement l’amour est mort…
Chagueneuil, ville de moyenne importance qui n’a d’intérêt que sa nationale permettant aux camions venant d’Espagne et du Portugal d’alimenter l’hexagone. Le centre-ville ? Mort. La gare SNCF squattée par les mauvaises herbes est à l’image de la ville : mourante. L’appel des grandes villes a créé une fracture intergénérationnelle amorçant bien plus rapidement l’acte de mort de la ville… Pourtant le maire veut y croire et, imitant l’émission de téléréalité fermière, organise chaque année un bal permettant de se faire rencontrer des célibataires afin de repeupler le coin.
Ce soir du 14 février 2011, sur la place de la mairie tout est prêt. Une scène décorée avec des lampions de couleurs différentes prête à accueillir Marcel et son orchestre. Un stand saucisse bière dans un coin, des tables d’école dans un autre. Niveau population, des célibataires de chaque sexe se cherchant du regard devant des couples de vieux venus en spectateur. Pas besoin d’être à couvert et la présence de Banane et Virus sirotant des bières à l’appel n’inquiète personne. Tout se passe parfaitement bien malgré quelques échauffourées provoquées par le surplus de testostérones. Histoire de mettre les moyens, la municipalité déclenche un petit feu d’artifice. Malheureusement certains pétards n’iront pas s’éclater dans la noirceur du ciel mais bien contre les boites crâniennes des Roméo et Juliette en recherche d’amour… Le temps de réaction de la foule se fait lent confondant le spectacle offert dans le ciel et le chant macabre du fusil à pompe au creux de la main de Virus. Comme les deux premiers actes, Banane et Virus exécutent leur châtiment dans une cadence sans fausse note. La ville devient un labyrinthe où chaque coin de rue se termine par la rencontre d’un canon scié… 20 minutes de chasse à l’homme où se mêlent cris stridents des futures victimes et rires psychotiques des deux chasseurs.
Cinq minutes après le dernier coup de feu, les premières forces de police atteignent le cœur de la ville. Cette fois-ci, l’heure n’est plus à la contemplation mais à l’action car les cas Virus etBanane hantent toutes les mémoires et même si aucune preuve ne peut faire le lien entre les drames du 15 août et du 31 décembre et celui-là, on ne prend aucun risque. De son côté l’inspecteur Gofrard est déjà sirène hurlante sur la route.
- Pour moi cela ne pouvait faire aucun doute, Virus et Banane avaient de nouveau frappé. Le cas de Copycat me laissait perplexe car reproduire la barbarie de ce duo demandait un quota de folie que peu de personnes pouvaient atteindre. Il ne restait plus qu’à espérer un faux pas ou un barrage bien placé capable de les capturer…
Malgré une intervention bien coordonnée des divers services policiers et de la gendarmerie, les deux suspects passeront à travers les mailles du filet. Sur place, la SRPJ commence à étudier la scène mais loin de l’espace confiné, l’habituel périmètre englobait l’ensemble du centre-ville… Sur la place de la Mairie, la recherche de la pièce maîtresse ne fut pas longue à identifier. Marcel Aymée leader de l’orchestre retrouvé mort au milieu de la scène laissait dépasser de sa bouche rigidifiée une corde. À l'autre bout, la clé USB enfoncée jusqu’au cou…
- On est impuissant s’indigne Gofrard et raccroché à l’espoir d’avoir un élément à exploiter sur cette fichue clé, on ne peut qu’enfoncer la touche play et espérer…
- on est face à un mur, déplore le procureur en charge de l’affaire. En haut, on accepte très mal que ces deux psychopathes soient en liberté surtout que dans les forums, le nom de Virus revient de plus en plus. Il nous faut absolument une piste et éviter qu’ils deviennent des espèces de héros de l’antisystème.
Malheureusement, la clé ne délivrera aucun indice permettant d’identifier leur prochaine escapade meurtrière. Quatre fichiers comme à son habitude et toujours en fond l’échec d’une société comptée avec une trame de fond une certaine consternation qui démontre un résidu d’humanité dans l’âme torturée de Virus. Car avant de se muer en une bête meurtrière, Virus a essayé, a tenté de se construire autour d'une relation saine et équilibrée. Mais le schéma prémédité d’une vie à deux ne correspond pas à l’ADN destructeur et associable de Virus (l’ère adulte). Une asociabilité qui ressort aussi autour de lui. Incapable de se créer des liens, Virus traverse la vie seule et sans dialogue possible. Si certains médecins qui croisent son chemin se questionnent sur sa capacité à aimer, aucun ne sera assez décisif pour l’arrêter avant l’irréversible… (Attacher son prochain). Plus bas que terre, Virus se cache, évite tous rapports, pour lui les dés sont pipés et la vérité est plus noire que la réalité. L’acceptation de sa déchéance sera l’élément déclencheur de ce 15 août pluvieux… Personne ne viendra plus le relever, par contre lui viendra vous faire chuter (Nouvelle du fond). Sûr de sa folie mais surtout de son incapacité à se réhabiliter, Virus admet son échec d’intégration et endosse sa part de responsabilité malgré une envie de s’accrocher à une branche pour éviter cette chute interminable. (Période d’essai).
Silencieux depuis ce 14 février 2011, les deux ennemis publics numéro un continuent à échapper à la police. Incapable de prédire leur prochaine attaque, les forces de l’ordre semblent déroutées par la trajectoire mortelle choisie par Virus et Banane. Pourtant, toujours en liberté, c’est une France transformée en proie à la peur qui se réveille chaque matin espérant tenir une journée de plus sans que les deux loups sortent de leur bois… Fermez vos portes à clé, baissez vos volets car il est fort possible que Virus soit en ville ce soir.
Chronique réalisée par Drill : http://thadrill.blogspot.com/
Prochaine chronique : Orelsan - Le Chant des sirènes