« Pionnier parmi les groupes de rap français, IAM fait incontestablement partie des figures emblématiques du mouvement hip hop hexagonal d'aujourd'hui. Composé des rappeurs Akhenaton et Shurik'n, du DJ Khéops, du musicien polyvalent Imhotep et des danseurs Kephren et anciennement Freeman, IAM reste le seul groupe a avoir traversé le temps, sans éclats de voix, sans soubresauts, mais avec tellement de majesté. » Raging Bull
Après le classique « L’École du Micro d'Argent », le travail d'Iam s'est fait autrement en mettant sur le banc des remplaçants les deux bidouilleurs sonores que sont Khéops et Imhotep. Effectivement ces derniers participent peu aux deux derniers albums du groupe. Et cela s'entend. La plupart des auditeurs ont noté ce changement musical important. La conception de « Arts Martiens » quant à lui se différencie de ses deux prédécesseurs par l'implication entière des cinq amis. Pour ce projet le groupe s'est réuni complètement et décide de réaliser cet album tous ensemble. On retrouve donc en majorité, des musiques d'Imhotep. Ils signent là un retour aux sources en lui laissant diriger la partie musicale. On reconnaît également la griffe de Dj Khéops, posant de ses propres pattes ses scratchs sur quasiment la totalité de l'opus. Et pour finaliser le tout et donner forme à tout cela, Akhenaton (Minamoto) et Shurik'n (Benkei) honorent convenablement cet art urbain. Aussi lorsqu'on entend Chang Ti rapper sur « Tous les saints de la terre », utilisant un flow qu'on croyait perdu sur son dernier album solo, nous pouvons qu'être bluffer. Les rappeurs reviennent à une façon de rapper optimale. Les mêmes éléments que l'album au million d'exemplaires vendus sont donc utilisés ici.
Dès que le groupe nous annonce qu'il ira enregistrer et mixer leur album à New York, beaucoup ont commencer à saliver sur un hypothétique featuring venant de l'outre atlantique. C'est alors que des pronostics sont lancés et certains commencent même à songer à la venu de Nas, un duo fantasmatique qui serait digne du groupe. De retour de Big Apple nous apprenons que le seul invité de l'album sera tout simplement l'autre fils de la mère de Shurik'n, c'est à dire son frère Faf Larage. Le groupe avait envisagé la possibilité de convier un rappeur de marque afin de les accompagner sur un titre mais coté budget cela ne semblait pas intéressant. Il est donc logique de privilégier la création de clips qui mettront en avant leur projet que de mettre une grosse somme pour un feat qui serait qu'un simple acte anecdotique de l'album. Tant mieux diront nous. Ce qui nous intéresse surtout c'est le contenu, ce qu'Iam peut encore faire en 2013.
Près de 25 ans dans le rap, qu'est ce qu'ils peuvent donc encore avoir à raconter ceux-là ? « Arts Martiens » nous plonge essentiellement dans la story d'Iam. Une histoire qu'Antoine De Caunes pouvait s'en charger en endossant de nouveau son rôle de narrateur. Mais qui peut autre qu'eux mêmes raconter la leur ? C'est ainsi qu'avec « Benkei et Minamoto », nous vivons la rencontre entre les deux partenaires, ou plutôt une complicité de longue date entre Sentenza et Jo l'Indien. Les deux rappeurs usent sur ce titre d'une allégorie mettant en avant leur amitié sous des aires, et atmosphère ''shaolinienne'' qui pourrait sortir tout droit d'un conte de samouraï. Une technique qu'on a plus entendue depuis que ces élèves ont quitté l'école du micro d'argent. Tout au long de l'album, ils n'hésitent pas à évoquer de façon récurrente qu'Iam est toujours là. Avec « Spartiate Spirit », le groupe ravive leur passion pour le rap, et montre que malgré certaines médisances, il leur est impossible de raccrocher le maillot. Même si beaucoup déclarent que ce titre en guise d'ouverture fait tâche sur l'album, il est difficile d'ignorer ce dernier sachant ce qu'il invoque pour le groupe. Afin de continuer sur cette lancée, il expose leur sentiment personnel et professionnel sur « Les raisons de la colère », « Marvel » avec un coté égotrip en surface, « Un dernier coup d'éclat » ou encore « Debout les braves ». Iam, ils le sont et le resteront. Il est facile de laisser les autres avancer des affirmations calomnieuses, Iam utilise donc leur album comme droit de réponse sans vouloir rentrer dans des clashs de gamins. Nous aurions pu penser que tout cela est concentré sur de l'égocentrisme de ne rapper que pour sur sa pomme. Il n'en est rien de tel. Comme un prolongement par continuité, avec l'album que tous connaissent, ils exploitent ces mêmes thèmes. « Misère » et « Habitude », ne nous ferons pas oublier qu'on est pas tous nés sous la même étoile. « Pain au chocolat » malgré ce coté dangereux qui peut se dégager de ce morceau, nous avons droit là à quelques couplets maladroits pour terroriser le petit (Nicolas) Jean-François. Le groupe arrive à mettre en avant des concepts qui peuvent encore nous étonnés après tout ce temps. Avec « Après la fête » nous nous mettrons à se souvenir de notre époque de boutonneux, une nostalgie qui pourrait même faire renaître cette amourette de l'époque du bac à sable. « Sombres manœuvres », the story telling de l'album qui nous emmène dans un univers exceptionnel grâce à ce sample entraînant qu'Imhotep a déniché d'où je ne sais où. D'ailleurs les musiques de l'album sont pour la plupart remarquables. Des échantillons harmonieux qui nous dodelinent même en restant river sur nos chaises. Certains diront qu'ils sont simples, à base de sample et voilà c'est fait ! Ne dit-on pas pourquoi faire compliquer quand on peut faire simple. Saluons donc là le beau travail de Tonton, qui arrive encore à nous surprendre. Mais le bougre n'est pas le seul compositeur de cet album. Celui qui marche sur les traces d'Iam sans y faire parti officiellement, y ait aussi pour beaucoup. Tout comme les frères jumeaux d'Asgard, Faf Larage suit le groupe mais avec du recul. On lui doit ainsi des titres comme « Habitude », « Pain au chocolat » ou encore « « Misère ». Il épaule là parfaitement ses acolytes. Et au final comme dit plus haut, l'ingrédient qui renforce le tout : les scratchs de Blondin. Il faut l'avouer sans sa touche individuel, certains titres n'auraient pas cette saveur particulière qui titille nos ouïes.
Mais dans tout ça il y a tout de même un titre qui nous fait rester perplexe. « Un dernier coup d'éclat » ? Ce dernier titre de l'album qui s'ouvre sur leur victoire de la musique remporté en 1995 donne de la matière à réfléchir. En tout cas les curieux se demanderont ce que cela peut signifier avant même l'écoute du morceau. Signe-t-il la fin de l'épopée Iam ? Conclut là-t-il le dernier album du groupe ? Il faut dire que les cinq gaillards n'ont plus vingt ans. Lorsqu'on pense que Shurik'n à 47 ans, on est en droit de se demander jusqu'à quand vont-ils tenir ? Et on revient encore une fois à cette question, le rap a-t-il une limite d'âge ? Mais vu la forme de ces mecs là et ce qu'ils peuvent encore donner sur un album, cela serait très étonnant si effectivement c'était leur dernier coup d'éclat.
A la base cet album aurait du être un hommage à Enio Morricone. Un projet reprenant ses samples. Mais ce couillon demandait beaucoup trop de monnaie pour Iam. On se retrouve donc avec un album élémentaire. (« Je voudrais donc personnellement dans cette chronique dire merci à Mr Morricone d'avoir refuser ce projet lui rendant hommage »). Sortir un album de cet qualité après tant d'années alors que beaucoup d'autres rappeurs ayant déjà une longue carrière deviennent de plus en plus pathétiques musicalement, ne peut que rehausser le rap français là où ils l'ont laissé. Les mauvaises langues prétendront sans aucun doute que l'absence de Freeman explique en partie le caractère bonifié de cet album. On se rappelle des critiques dégageant une certaine froideur envers ce dernier au sujet de Revoir un Printemps et Saison 5. Pour beaucoup de personnes l'une des raisons majeures de ces échecs est la présence répétée du Fils du Dragon. D'autres avec un point de vue plus mesuré regrettera sa présence à l'occasion peut être d'un titre, d'un couplet à l'instar d' « Un bon son brut pour les truands ». « Arts Martiens » a beau être simpliste comme album comme certains aiment le dire mais suffisant pour montrer aujourd'hui qui est le patron. On se rappellera toujours de cette rivalité dans les années 90 : Iam VS NTM. Qui serait le gagnant ? Aujourd'hui on a la réponse. De nos jours d'autres rivalités sont en cours qui font qu'Iam reste de l'antiquité à leurs yeux. Dans ce cas mieux vaut vivre dans l'antiquité que dans le Futur...
Les cinq meilleurs titres pour ma part : Pain au chocolat, Benkei et Minamoto, Sombres manœuvres, 4.2.1, Habitude
Ma note : 18/20
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