Un sage a dit un jour qu'il expérimenterait l'enregistrement d'un album entièrement basé sur l'improvisation. Tout se construirait à l'intérieur de sa cabeza. Que ce soit les lyrics ou les notes de musique, laisser son esprit imaginaire faire, telle était sa devise. Et ce sage répondait au nom de Zoxea. C'est ainsi que va naître ce projet sobrement intitulé : « Tout dans la tête ». Toutefois avant la sortie de cet opus, le rappeur se fait discret. Il prend son temps. D'ailleurs on pourrait se demander ce qu'il a pu faire entre la composition de deux morceaux. Pas de featuring ici et là, il n'est même pas convié sur le projet de Dany Dan. A cet instant précis il est déclaré perdu de vue, tout comme son frère Melo P d'ailleurs. Il le dit lui même, il n'est pas pressé... Il suffira d'un titre pour enfin se dire « ça y est le compte à rebours est lancé, son album arrive ». Comme prémices, c'est « Boulogne Tristesse » qui ouvre le bal. Un titre qui fera parler de lui, par sa qualité mais aussi par le thème traité. Il sera même classé comme le meilleur morceau de l'année 2010 par beaucoup de personnes côtoyant le rap français de près. Pris par cet élan, le rappeur nous soumet deux autres titres épatants l'un après l'autre. Tout d'abord « Comme un lion », là encore la qualité du son n'est pas à négliger. Puis « Show Time », où le temps de réunir pendant quatre minutes trois hommes et un micro. L'album s'annonce alors sous de bonnes augures. Zoxea semble maîtriser un retour quasi parfait, même si certains regrettent ses clips donnant la sensation d'avoir été filmés à l'aide d'un téléphone portable, et qui dénature en quelque peu la qualité des morceaux déjà proposés.
Dès les premières notes de musique de ce nouvel album qui s'introduit par le titre « Paroles et musique », on reste scotchés. La remise au goût du jour de l'effet sonore de Stradivarius fait mouche. Les bonnes impressions du début semblent toujours se confirmer. Mais cela va-t-il se poursuivre avec les sept autres titres, ceux dont nous n'avons pas encore pris connaissance ? D'ailleurs pourquoi seulement onze titres ? Le rappeur joue-t-il les avares ? En effet le peu de de sons qu'il a proposé dans cet opus peut difficilement combler la boulimie musicale de quelques uns. Mais tout ceci est dû à la superstition de Zoxea, pour qui le nombre 11 est un apport de réussite. Pour anecdote cet album devait plutôt voir le jour le 11 novembre 2011, mais pour x raisons cela ne s'est pas fait. L'alliance entre le parlé de Zoxeakopat et les productions de « Tout dans la tête » forment là un gros point fort. Impossible de dire qu'il est mal conçu. Les instrumentaux sont construits avec parcimonie comme le laisse constater les morceaux « Voir plus loin », l'un des morceaux les mieux réussit de l'album ou « Ma Lady » avec une gratte de guitare qui vient se mélanger à d'autres types de sons, créant ainsi une harmonie parfaite entre eux. Cet album serait réellement remarquable dans une version instrumentale. Mais dans ce cas avoir tout dans la tête ne voudrait plus rien dire. Le créateur de l'hymne de mozeozet est autant à l'aise au micro que derrière les manettes de sa table de mixage. Effectivement, pratiquement tous les titres ont été composés par lui-même hormis « Comme un lion », l'excellent et obscur « Meurt'rap » bâtis par la patte de Melopheelo et « Déjà tout petit » réalisé par BKS. Zoxea ne néglige rien, même les refrains, il préfère les gérer lui-même. Donc aucun invité à la voix de velours entrecoupant ses couplets. Seuls ses chants feront l'affaire. Et dans l'ensemble cela est bien maîtrisé.
En l'écoutant avec attention, on a l'impression que Zoxea a voulu revenir sur ses premières traces. En tout cas des indices laissés ici et là nous le font croire. Tout d'abord, afin de se remémorer les souvenirs de l'époque IV My People, la paire Busta Flex et Zox se reforment le temps d'un morceau tout aussi égotrip que « On veut le roro ». Les deux compères nous font là une démonstration de leur aptitude à manier le mic en redonnant eux aussi un sens au mot flow sur « C'est nous les reustas ». Nous pouvons également constater qu'avec « Paroles et musiques » le rappeur s'adresse de nouveau à sa fidèle compagne, sa musique comme au temps de « Rap, musique que j'aime ». Il se dégage comme une certaine nostalgie dans ses dires. Le rappeur regrette la période où la musique était honorée, où le rap se faisait en famille. Il n'hésite pas à le rappeler avec « Boulogne Tristesse » en citant les rappeurs phares qui ont construit la notoriété du 92. Et pour continuer sur cette phase nostalgique, il retrace une partie de son enfance avec « Déjà tout petit ». Mais malgré une rétrospective rappelant l'ancien temps, cela ne l'empêche pas d'user d'un artifice récent et de mauvais goût. En effet sur ce dernier l'abus de l'auto-tune se fait distinguer. Cela était-il nécessaire ? En tout cas le morceau sera sûrement le premier à être zapper après avoir goûter à trois bonnes premières parts de sa galette. Cependant Zoxea ne souhaite pas nous faire larmoyer, loin de là de lui cette idée. Mais il finira tout de même ce projet par « Oui, je l'aimais », un message d'amour, un amour de malade mental.
Certes ce nouvel album de Zoxea est très court. Mais la qualité générale de cet opus est indéniable. Le rappeur a pris du temps afin de le réaliser entièrement mais n'oublions pas que cela s'est fait sans rien écrire. Saluons alors cette démarche artistique. Il restera le premier rappeur français, voire le seul, à suivre les traces de Notorious BIG et Jay Z. « Tout dans la tête » est un album à ne surtout pas laisser de coté et sera sans aucun doute l'une des meilleurs sorties de cette année.
Les 5 meilleurs titres pour ma part : Tout dans la tête, Paroles et musique, Voir plus loin, Boulogne tristesse, C'est nous les reustas
16/20
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